L’affaire SEA France a propulsé la SCOP à la une de l’actualité et avec elle la problématique de la reprise de l’entreprise par ses salariés. Or, il existe, pour les petites structures d’autres solutions avantageuses comme la donation par le chef d’entreprise de son fonds de commerce au salarié*. Ce mode de transmission des fonds de commerce présente des avantages fiscaux méconnus qui en font une solution particulièrement attractive dans le cadre d’une transmission de patrimoine familiale.

*Selon l’Insee 50% des entreprises cédées n’ont pas de salariés et 29% ont entre 1 et 2 salariés.
La transmission gratuite du fonds de commerce peut-elle être… gratuite ?
La réponse se trouve dans l’article 790 A du Code Général des impôts (CGI).
Il permet au salarié bénéficiant d’une donation d’un fonds de commerce par le propriétaire d’obtenir une remise de 300 000 euros sur la valeur du fonds de commerce. Par conséquent, si la valeur du fonds de commerce est estimée, par exemple à 250 000 euros, le salarié ne paiera aucun droit de donation puisque la valeur de la ristourne est supérieure à la valeur du fonds transmis.
Ce système est avantageux non seulement pour le propriétaire du fonds de commerce, mais aussi pour le salarié.
Un dispositif gagnant gagnant :
Ce dispositif est attractif pour le propriétaire du fonds de commerce d’un point de vue fiscal.
On sait que si le propriétaire du fonds de commerce exerce son activité au sein d’une entreprise individuelle, la donation de son fonds est en principe assimilée à un arrêt d’activité synonyme d’une imposition immédiate. L’administration fiscale considère en effet que la donation d’une entreprise individuelle déclenche les mêmes impositions que la vente d’une entreprise ! Le propriétaire du fonds sera donc imposé sur la donation comme s’il avait vendu son fonds et, par là même, réalisé une plus-value.
Si la valeur du fonds de commerce est inférieure à 300 000 euros, le propriétaire pourra bénéficier d’une exonération totale de plus-value ou alors d’une exonération partielle si la valeur de son fonds est comprise entre 300 000 et 500 000 euros (article 238 quindecies du Code général des impôts).
L’autre avantage offert au propriétaire du fonds réside dans la viabilité de sa structure. Le propriétaire du fonds de commerce peut en effet souhaiter transmettre son entreprise à une personne qui connaît la bien et qui aura par conséquent toutes les chances d’en assurer la bonne pérennité
Les statistiques démontrent d’ailleurs qu’un salarié a deux fois plus de chances de réussir qu’un repreneur extérieur.
Du côté du salarié, ce système est évidemment intéressant à plusieurs égards. Tout d’abord, s’il n’a pas les fonds nécessaires pour racheter le fonds de commerce de son patron. Par ailleurs, alors que le bénéficiaire d’une donation qui se fait hors du cadre familial est en principe imposé, le salarié obtiendra une remise de 300 000 euros sur la valeur du fonds.
Quels fonds sont concernés ?
Le bénéfice de cet avantage fiscal est réservé aux entreprises dont l’activité est industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.
Et quels salariés ?
L’heureux salarié doit tout d’abord être titulaire, soit d’un contrat d’apprentissage, soit d’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) depuis deux ans au moins, et exercer ses fonctions à temps plein dans l’entreprise (au moins 35 heures par semaines).
De même, il doit poursuivre l’exploitation à titre d’activité professionnelle pendant au moins cinq ans après la donation.
Cet exercice professionnel doit être unique effectif et continu. Le salarié qui aura suspendu son activité au cours des cinq années d’exercice exigée se verra donc retirer l’avantage fiscal. Par ailleurs, il doit assurer pendant 5 ans au moins la direction effective de l’entreprise, c’est-à-dire être le chef d’entreprise.
Quel donateur ?
Si celui-ci avait acheté le fonds, il faut qu’il soit propriétaire depuis plus de deux ans.
Lorsque la transmission porte sur des parts ou actions acquises à titre onéreux, le donateur doit les détenir depuis plus de deux ans.
Donation de fonds de commerce et transmission de patrimoine : le cumul avec d’autres ristournes
L’abattement de 300 000 euros offert au salarié repreneur peut se cumuler avec plusieurs autres abattements. Là réside probablement l’attrait essentiel de la formule
Tout d’abord, un abattement supplémentaire sera octroyé au salarié bénéficiaire de la donation si celui-ci a des liens de parenté avec le propriétaire du fonds.
En effet, si le donateur donne son fonds de commerce à un salarié membre de sa famille, ce dernier cumulera l’abattement de 300 000 euros et une autre remise d’un montant déterminé en fonction du degré de parenté (montant actualisé chaque année).
- Donation entre ascendants et enfants : abattement fixé à 159 325 euros ;
- Donation entre frères et sœurs : 15 932 euros ;
- Donation en faveur des neveux et nièces : 7 967 euros.
Deuxièmement si le salarié bénéficiaire est une personne handicapée il bénéficiera d’un abattement supplémentaire de 159 325 euros pour 2011.
Troisièmement, le salarié pourra bénéficier d’une réduction de droits de donation calculée en fonction de l’âge du propriétaire du fonds, donateur.
Si le propriétaire donnant son fonds a moins de 70 ans la réduction de droits de donations sera de 50% alors que si celui-ci a entre 70 et 80 ans, la réduction sera de 30 %.
Un exemple pour mieux comprendre :
Gérard, 55 ans, à l’abri du besoin a décidé de donner son magasin de jouets qu’il a acheté il y a 10 ans à son fils Léon qu’il emploie comme vendeur depuis 5 ans.
La valeur du fonds de commerce est estimée à 600 000 euros.
Léon bénéficiera :
- de l’abattement de 300 000 euros puisque le fonds de commerce, son père et lui remplissent les conditions exigées par la loi.
- De l’abattement de 159 325 euros (abattement en raison d’un lien de parenté : entre père et fils)
Grâce à ces deux abattements, Léon ne paiera des droits de donation que sur 149 675 euros (600 000 - 300 000 – 159 325).
Cependant Jean, le père de Léon ayant moins de 70 ans, la base de calcul des droits de donation sera divisée par deux grâce à la ristourne de 50%.
Ainsi, les droits de donation seront calculés sur la base de 79 662,25 euros.
Ce régime qui favorise la création d’emploi est donc très avantageux puisqu’il aboutira, pour les donations de fonds de commerce de faible ou moyenne valeur (c’est-à-dire inférieure à 500 000 euros) à une exonération totale des droits de donation que le salarié aurait du payer. Pa ailleurs, dans la majorité des cas, le propriétaire du fonds ne sera pas pénalisé fiscalement puis qu’il bénéficiera des exonérations prévues pour les plus-values.
Il est à noter que la liquidation judiciaire du fonds de commerce au cours des cinq années suivant la transmission n’entraîne pas la déchéance du régime de faveur.
SISY fiscaliste.
Références
Article 790 A du Code général des Impôts (modifié par la loi n°2008- 776 du ‘ août 2008- article 66)
I.-Pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, en cas de donation en pleine propriété de fonds artisanaux, de fonds de commerce, de fonds agricoles ou de clientèles d'une entreprise individuelle ou de parts ou actions d'une société, il est appliqué, sur option du donataire, un abattement de 300 000 euros sur la valeur du fonds ou de la clientèle ou sur la fraction de la valeur des titres représentative du fonds ou de la clientèle, si les conditions suivantes sont réunies :
a) L'entreprise ou la société exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ;
b) La donation est consentie aux personnes titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée depuis au moins deux ans et qui exercent leur fonction à temps plein ou d'un contrat d'apprentissage en cours au jour de la transmission, conclu avec l'entreprise dont le fonds de commerce ou la clientèle est transmis ou avec la société dont les parts ou actions sont transmises ;
c) Abrogé ;
d) Lorsqu'ils ont été acquis à titre onéreux, le fonds ou la clientèle mentionnés ci-dessus doivent avoir été détenus depuis plus de deux ans par le donateur ou la société ;
e) Lorsque la transmission porte sur des parts ou actions acquises à titre onéreux, celles-ci ont été détenues depuis plus de deux ans par le donateur ;
f) Les donataires poursuivent à titre d'activité professionnelle unique et de manière effective et continue pendant les cinq années qui suivent la date de la transmission l'exploitation du fonds ou de la clientèle transmis ou l'activité de la société dont les parts ou actions sont transmises et dont l'un d'eux assure, pendant la même période, la direction effective de l'entreprise. Dans le cas où l'entreprise fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire prévue au titre IV du livre VI du code de commerce dans les cinq années qui suivent la date de la transmission, il n'est pas procédé à la déchéance du régime de faveur prévu au premier alinéa.
II.-Lorsque les donataires ont exercé l'option prévue au I, le bénéfice de ses dispositions est exclusif de l'application de l'article 787 B sur la fraction de la valeur des parts représentative des biens autre que le fonds artisanal, le fonds de commerce, le fonds agricole ou la clientèle, et de l'article 787 C à raison de la donation à la même personne des biens autres que le fonds artisanal, le fonds de commerce, le fonds agricole ou la clientèle, affectés à l'exploitation de l'entreprise.
III.-Le I ne peut s'appliquer qu'une seule fois entre un même donateur et un même donataire.
Article 790 du Code général des Impôts (modifié par la loi n° 2011- 900 du 29 juillet- article 8)
I.-Les donations en pleine propriété des parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale qui réunissent les conditions énumérées à l'article 787 B bénéficient sur les droits liquidés en application des articles 777 et suivants d'une réduction de 50 % lorsque le donateur est âgé de moins de soixante-dix ans.
II.-Les donations en pleine propriété de la totalité ou d'une quote-part indivise de l'ensemble des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels, affectés à l'exploitation d'une entreprise individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale qui réunissent les conditions énumérées à l'article 787 C bénéficient sur les droits liquidés en application des articles 777 et suivants d'une réduction de 50 % lorsque le donateur est âgé de moins de soixante-dix ans.
Article 238 quindecies (modifié par le Décret n°2006- 536 du 24 mars 2006)
I. - Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies et réalisées dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole à l'occasion de la transmission d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité autres que celles mentionnées au V sont exonérées pour :
1° La totalité de leur montant lorsque la valeur des éléments transmis servant d'assiette aux droits d'enregistrement mentionnés aux articles 719, 720 ou 724 ou des éléments similaires utilisés dans le cadre d'une exploitation agricole est inférieure ou égale à 300 000 euros ;
2° Une partie de leur montant lorsque la valeur des éléments transmis servant d'assiette aux droits d'enregistrement mentionnés aux articles 719, 720 ou 724 ou des éléments similaires utilisés dans le cadre d'une exploitation agricole est supérieure à 300 000 euros et inférieure à 500 000 euros.
Pour l'application du 2°, le montant exonéré des plus-values est déterminé en leur appliquant un taux égal au rapport entre, au numérateur, la différence entre le montant de 500 000 euros et la valeur des éléments transmis et, au dénominateur, le montant de 200 000 euros.
II. - L'exonération prévue au I est subordonnée aux conditions suivantes :
1 L'activité doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans ;
2 La personne à l'origine de la transmission est :
a) Une entreprise dont les résultats sont soumis à l'impôt sur le revenu ou un contribuable qui exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu ;
b) Un organisme sans but lucratif ;
c) Une collectivité territoriale, un établissement public de coopération intercommunale ou l'un de leurs établissements publics ;
d) Une société soumise à l'impôt sur les sociétés qui répond cumulativement aux conditions suivantes :
1° elle emploie moins de deux cent cinquante salariés et soit a réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros au cours de l'exercice, soit a un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros ;
2° son capital ou ses droits de vote ne sont pas détenus à hauteur de 25 % ou plus par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne répondant pas aux conditions du précédent alinéa de manière continue au cours de l'exercice. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations de sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des sociétés de développement régional, des sociétés financières d'innovation et des sociétés unipersonnelles d'investissement à risque ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds. Cette condition s'apprécie de manière continue au cours de l'exercice ;
3 En cas de transmission à titre onéreux, le cédant ou, s'il s'agit d'une société, l'un de ses associés qui détient directement ou indirectement au moins 50 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux ou y exerce la direction effective n'exerce pas, en droit ou en fait, la direction effective de l'entreprise cessionnaire ou ne détient pas, directement ou indirectement, plus de 50 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de cette entreprise.
III. - Est assimilée à une branche complète d'activité l'intégralité des droits ou parts détenus par un contribuable qui exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu et qui sont considérés comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession au sens du I de l'article 151 nonies.
Lorsqu'il est satisfait aux conditions prévues aux 1 à 3 du II, les plus-values réalisées à l'occasion de la transmission de droits ou parts mentionnés au premier alinéa du présent III sont exonérées pour :
1° La totalité de leur montant lorsque la valeur vénale des droits ou parts transmis est inférieure ou égale à 300 000 euros ;
2° Une partie de leur montant lorsque la valeur vénale des droits ou parts transmis est supérieure à 300 000 euros et inférieure à 500 000 euros.
Pour l'application du 2°, le montant exonéré des plus-values est déterminé en leur appliquant un taux égal au rapport entre, au numérateur, la différence entre le montant de 500 000 euros et la valeur des titres transmis et, au dénominateur, le montant de 200 000 euros.
Pour la détermination des seuils mentionnés aux 1° et 2°, il est tenu compte de la transmission de l'intégralité des droits ou parts définis au premier alinéa ainsi que des transmissions réalisées au cours des cinq années précédentes.
Par dérogation au V, les dispositions du présent III s'appliquent aux plus-values réalisées sur les droits ou parts de sociétés dont l'actif est principalement constitué de biens immobiliers bâtis ou non bâtis affectés par la société à sa propre exploitation ou de droits ou parts de sociétés dont l'actif est principalement constitué des mêmes biens, droits ou parts.
En cas de transmission à titre onéreux de droits ou de parts ouvrant droit à l'exonération prévue au deuxième alinéa, le cédant ne doit pas détenir directement ou indirectement de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire.
IV. - L'exonération prévue aux I et III est remise en cause si le cédant relève de l'une des situations mentionnées au 3 du II et au dernier alinéa du III à un moment quelconque au cours des trois années qui suivent la réalisation de l'opération ayant bénéficié du régime prévu au présent article.
V. - Sont imposées dans les conditions de droit commun les plus-values réalisées à l'occasion de la transmission de l'entreprise individuelle ou de la branche complète d'activité portant sur :
1° Des biens immobiliers bâtis ou non bâtis ;
2° Des droits ou parts de sociétés dont l'actif est principalement constitué de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits ou parts de sociétés dont l'actif est principalement constitué des mêmes biens, droits ou parts.
VI. - Pour l'application des dispositions prévues aux III et V, les droits afférents à un contrat de crédit-bail conclu dans les conditions prévues au 2 de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier sont assimilés à des éléments de l'actif.
Pour l'application des dispositions prévues au III, les biens mentionnés au I du A de l'article 1594-0 G ne sont pas considérés comme affectés à l'exploitation de l'activité.
VII. - La transmission d'une activité qui fait l'objet d'un contrat de location-gérance ou d'un contrat comparable peut bénéficier du régime défini au I si les conditions suivantes sont simultanément satisfaites :
1° L'activité est exercée depuis au moins cinq ans au moment de la mise en location ;
2° La transmission est réalisée au profit du locataire.
Pour l'appréciation des seuils mentionnés aux 1° et 2° du I, il est tenu compte de la valeur des éléments de l'activité donnée en location servant d'assiette aux droits d'enregistrement mentionnés aux articles 719, 720 ou 724 ou de la valeur des éléments similaires utilisés dans le cadre d'une exploitation agricole mise en location.
VIII. - L'option pour le bénéfice du régime défini au présent article est exclusive de celui des régimes prévus au I de l'article 41, au I ter de l'article 93 quater, aux articles 151 septies, 151 octies et 151 octies A, au II de l'article 151 nonies et aux articles 210 A à 210 C et 210 E.
IX. - Les dispositions du présent article s'appliquent aux transmissions réalisées à compter du 1er janvier 2006.
Article très interssant tant pour les professionnels que les particuliers. Une mention particulière pour le "cas pratique" très exolicite !
Rédigé par : PHB | mars 2012 à 20:31